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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/413

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LES LIBÉRAUX ET LA FRANCE

les agitations de Bruxelles. Conduite par des libéraux, la révolution belge devait nécessairement s’inspirer de celle de juillet. La Commission de sûreté n’est en somme qu’une réplique du gouvernement provisoire installé sous la présidence de La Fayette, à la veille de l’avènement de Louis-Philippe.

L’analogie des principes explique suffisamment l’analogie des événements. L’imitation fut spontanée. Le cabinet de Paris n’eut qu’à laisser faire. Il s’abstint d’intervenir non seulement parce que son intervention l’eût brouillé avec l’Europe, mais encore parce qu’elle était inutile. « Ce ne sont pas les armes de la France, écrit très justement Mercy-Argenteau, qui triompheront de nous (c’est-à-dire du gouvernement). Elle ne l’essayera même pas : ce sont ses principes libéraux. Il n’y a pas de force contre cela, ni moyen de se garantir »[1]. Au reste, les libéraux belges étaient bien résolus, en cas d’échec, à s’unir à la France. Ils la considéraient, en quelque sorte, comme une position de repli, comme un refuge assuré. Et en cela, leurs alliés catholiques pensaient comme eux. « La presque totalité des Belges, écrit le ministre d’Autriche, ne désire pas d’être réunie à la France. Mais si leurs désirs pour la refonte entière de leur constitution et leur séparation de la Hollande rencontraient une forte opposition et s’ils prévoyaient d’être soumis par la force des armes, alors ils préféraient de devenir province française plutôt que de rentrer sous la domination de la Hollande »[2].

Tout ce que l’on sait confirme l’exactitude de ces paroles. Le vœu général réclamait un gouvernement à la fois constitutionnel et national : la liberté dans l’indépendance. Ni les fonctionnaires hollandais ni les ministres étrangers dont nous possédons les témoignages ne font la moindre allusion à l’existence d’un parti travaillant de propos délibéré en faveur de l’annexion à la France. Il est certain d’ailleurs que les républicains français qui voulaient à Paris forcer la main à Louis-Philippe et le lancer dans la guerre, trouvèrent en

  1. Gedenkstukken 1830-1840, t. IV, p. 109.
  2. Ibid., t. III, p. 152.