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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/428

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LES JOURNÉES DE SEPTEMBRE

et la joie de la victoire font oublier le passé. Les sentiments sont si unanimes que, pour la seconde fois, on accepte l’autorité par cela même qu’elle s’affirme. Pour se faire admettre de tous, il a suffi au Gouvernement provisoire de se proclamer. Il n’a d’autres titres que l’adhésion populaire et l’union des volontés. Si la nation le soutient, c’est parce qu’elle se reconnaît en lui et que pour ainsi dire il la personnifie.

L’activité de la Commission administrative avait tout de suite légitimé son installation. Dès le 24, elle chargeait un révolutionnaire espagnol, don Juan van Halen, de prendre le commandement des patriotes. Sans s’inquiéter de leurs origines, elle acceptait les services de tous les anciens officiers belges ou étrangers qui se mettaient à sa disposition. Le 26, elle lançait une proclamation déliant les soldats belges de leur serment de fidélité et les exhortant à se rallier au drapeau national, en même temps qu’elle assurait aux officiers qui quitteraient le service un avancement de grade. Elle faisait hospitaliser les blessés dans les maisons bourgeoises. Elle organisait l’arrière de la bataille tout en parant aux nécessités les plus immédiates de l’administration. À l’ordre légal détruit, elle s’efforçait de substituer un ordre nouveau par son autorité révolutionnaire. Elle ne s’imposait pas seulement aux patriotes, les conservateurs et les Orangistes eux-mêmes se tournaient vers elle comme vers la seule force qui pût s’opposer à l’anarchie. La Société Générale, qui deux jours auparavant avait refusé tout crédit à la Commission de Sûreté, s’empressait de lui avancer 10.000 florins au lieu de 5.000 qu’elle demandait[1].

La bataille cependant continuait à faire rage autour du Parc. Toutes les sorties des Hollandais étaient repoussées. Déjà des bandes de patriotes passaient à l’offensive. Le désarroi du prince Frédéric se trahissait par les contradictions de sa conduite. Une nouvelle tentative de négociation ayant échoué, il recourait brusquement à la terreur et faisait tirer sur la ville basse à boulets rouges, sans autre résultat que d’attiser l’énergie

  1. Discailles, Charles Rogier, t. II, p. 24.