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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/468

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LE GOUVERNEMENT PROVISOIRE ET LE CONGRÈS

bourguignonne, n’avait plus vécu que sous des souverains étrangers et qui venait de renverser le dernier d’entre eux. Van de Weyer et Rogier se déclaraient républicains en principe. Leclercq considérait la république américaine comme l’idéal à atteindre.

Pourtant, après de longs débats, la monarchie constitutionnelle fut admise comme forme de l’État par 174 voix contre 13. Si l’on se prononça pour elle, c’est d’une part que l’exemple de l’Angleterre la recommandait au jugement de la majorité comme le summum de la sagesse politique, c’est que l’avènement de Louis-Philippe en France justifiait cette opinion, c’est qu’enfin et surtout l’Europe n’eût pas admis que la Belgique, après le scandale de son indépendance, donnât au monde le spectacle plus scandaleux encore d’une constitution républicaine.

Entre la monarchie telle qu’elle fut instituée par le Congrès et la république, la différence ne consistait guère d’ailleurs que dans l’hérédité du chef de l’État. Comme le disait très exactement Rodenbach, c’était une « monarchie républicaine ». Toutes les précautions avaient été prises pour que le roi ne pût abuser du pouvoir qu’on lui laissait. Beaucoup se flattaient d’avoir renoué la tradition nationale en établissant, comme sous la maison de Bourgogne ou Marie-Thérèse, un régime intermédiaire entre la monarchie et la république. Le futur roi des Belges aurait à prêter serment à la constitution, et, dès lors, à reconnaître que ses pouvoirs il les tenait non de lui-même, mais de la nation. Il ne pourrait gouverner que d’accord avec elle. Il serait, sur le continent, le modèle achevé d’un roi parlementaire. Chargé du pouvoir exécutif, il ne peut prendre aucune décision qui ne soit contre-signée par un ministre, et les ministres sont responsables devant le parlement.

Organe de la volonté nationale, le parlement est appelé par cela même à jouer le rôle essentiel dans la constitution politique. Plusieurs membres du Congrès eussent voulu le concentrer en une assemblée unique. Ils faisaient valoir que les anciennes constitutions du pays n’avaient institué qu’un seul corps représentatif, que, sous le régime hollandais, la première