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Page:Pirenne - Histoire de l’Europe, des invasions au XVIe siècle.djvu/391

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inévitable. Elle éclata en 1409. L’année suivante l’armée polonaise infligeait à l’Ordre une terrible défaite à Tannenberg (15 juillet 1410). Ce fut pour celui-ci le commencement de la débâcle. Les villes et la noblesse ne tardèrent pas à se soulever contre lui. En 1454, elles se plaçaient sous la suzeraineté polonaise. Enfin, en 1466, le grand maître se résigna à céder à Casimir III la Prusse orientale avec Dantzig, Thorn, Marienburg et Elbing. Le reste de la Prusse conservait son autonomie politique mais faisait partie désormais de l’État polonais. Personne en Allemagne ne s’intéressa à ce recul de l’influence germanique. La population du pays, sauf les villes de la côte, se polonisa rapidement et la nationalité slave reprit possession de ces pays dont elle avait été expulsée au xiiiesiècle. La Pologne possédait désormais une large frontière en bordure de la Mer Baltique. Elle touchait au sud à la Mer Noire. Un brillant avenir aurait pu lui être assuré si, à la même époque, la poussée turque n’avait fermé aux chrétiens le commerce de l’Asie. D’ailleurs, personne ne s’intéressait au développement économique. L’avènement de Jagellon avait été pour la noblesse l’occasion d’assurer définitivement sa position. Le nouveau roi lui avait promis entre autres privilèges l’affranchissement de l’impôt. L’État polonais devenait décidément, sous le sceptre de ses rois, une république nobiliaire.

Les Slaves du sud, Croates, Slovènes, Serbes et Bulgares présentent un spectacle bien différent de celui des Polonais et des Bohémiens. La faiblesse des premiers les fit passer de bonne heure sous la domination hongroise qui eut soin de leur refuser la moindre autonomie politique. Les Serbes et les Bulgares, en revanche, établis au sud du Danube sur le territoire de l’Empire grec et englobés dans son Église, profitèrent de sa faiblesse après le règne de Justinien pour pénétrer profondément dans la Macédoine et jusqu’en Grèce. S’ils s’hellénisèrent à la longue, ceux de Macédoine conservèrent leur langue et leurs mœurs, comme les Germains qui avaient occupé le nord de l’Empire. Au xe siècle, sous l’empereur Romain Lacapène (920-944), les Bulgares avaient menacé Constantinople et il avait fallu leur payer tribut. Nicéphore Phokas (963-969), puis Jean Tzimiskes et Basile II Bulgaroctone (976-1025) les mirent sous la dépendance de l’Empire. Mais ils se soulevèrent à la veille de la quatrième Croisade ; et de ce soulèvement sortit le nouvel Empire bulgare, celui des Asénides. Baudouin périt en leur faisant la guerre.

Quant aux Serbes, sous Étienne Nemanja, ils secouent la domi-