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Page:Pirenne - Histoire de l’Europe, des invasions au XVIe siècle.djvu/392

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nation byzantine. Son fils Étienne Ier prend en 1221 le titre de roi. Ses successeurs s’agrandissent au détriment de l’Empire et des Bulgares dont Étienne III Ourosch détruit la puissance. Son fils Étienne IV Douschan conquiert toute la Macédoine, l’Albanie et s’étend même jusqu’au nord de la Save. Il prend le titre de tsar et se fait couronner empereur « des Serbes et des Romains » (1346). L’Empire, depuis la conquête latine, ne peut naturellement plus lutter et ne cherche qu’à conserver les côtes, laissant, se fonder sur sa frontière un Empire serbe dont on peut dire qu’il se serait installé sur le Bosphore, si l’arrivée des Turcs n’avait tout bouleversé dans les Balkans.

Enfoncés comme un coin dans la masse slave, les Hongrois ou Magyars, après avoir longtemps terrorisé l’Allemagne et même l’Italie du nord et la France occidentale par leurs terribles raids de cavalerie, avaient été enfin fixés par les victoires de Henri Ier et d’Othon dans la plaine du Danube. L’Église de leurs vainqueurs devait devenir la leur. Sous Sylvestre II, ils se rattachaient à Rome et l’érection de l’archevêché de Gran leur donnait une métropole religieuse.

Si l’on peut invoquer un exemple pour prouver l’insignifiance de la race dans le développement historique, c’est bien celui des Hongrois[1]. Par leur origine comme par leur langue, ces Finnois apparentés aux Turcs et aux Mongols, sont complètement étrangers au groupe ethnographique des peuples indo-européen. Pourtant, à peine ont-ils pris place au milieu d’eux et adopté le christianisme, qu’en dépit de la nature du sang qui coule dans leurs veines, de leur indice céphalique et des caractères linguistiques de leur idiome, leur vie sociale devient si conforme à celle de leurs voisins qu’il serait certainement impossible, si on ne le savait à l’avance, de les reconnaître pour des intrus. C’est qu’en réalité l’être physique des peuples se subordonne complètement à leur être moral. Encore barbares et dénués de civilisation propre, les Hongrois n’eussent pu conserver leur originalité finnoise qu’en conservant leur religion. Devenus chrétiens, ils devaient entrer dans la communauté européenne et prouver qu’ils possédaient eux aussi cette prétendue « faculté d’assimilation » que certaine école revendique pour la

  1. Il est amusant de constater qu’au commencement de 1917, la République finlandaise a envoyé une députation en Hongrie notifier sa naissance à ce peuple parent par son origine finnoise.