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Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/143

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sans plus, à la nécessité d’introduire le temps et l’espace dans le domaine du relatif, sans se demander où peut mener un pareil changement. Certes, dans l’histoire des sciences, il est fréquemment arrivé — et cela a été en général un progrès — que certaines notions, jadis considérées comme absolues, n’ont plus été ensuite regardées que comme relatives ; mais l’absolu n’a nullement été éliminé pour cela, les bornes de son domaine ont été simplement reculées. À mon sens, toute négation de l’absolu se ramène à l’attitude de quelqu’un qui, cherchant la cause d’un phénomène et ayant découvert que la circonstance qui avait été longtemps tenue pour telle ne l’est pas en réalité, en tirerait la conclusion que ce phénomène n’a pas de cause. Non, il n’est pas possible de ranger tout dans le relatif, pas plus qu’il n’est possible de tout définir et de tout prouver. Pour éprouver la valeur d’un concept quel qu’il soit, il est nécessaire de faire appel au moins à un autre concept qui n’a pas besoin d’être défini ; de même, toute démonstration doit s’appuyer sur une proposition fondamentale qui est tenue pour juste sans démonstration. C’est ainsi que le relatif s’appuie, en dernière analyse, sur un absolu indépendant. Autrement, le concept, la preuve et le relatif lui-même, restent suspendus en l’air comme un vêtement à qui il manquerait un clou pour l’accrocher. L’absolu est le point de départ fixe inéluctable, la seule question est de le placer là où il doit être.

Reprenons maintenant les arguments de notre contradicteur supposé. Il ne doit pas être difficile de leur trouver une réplique. La réduction de tous les poids atomiques à celui de l’hydrogène, si on peut y parvenir un jour, sera une des conquêtes les plus fondamentales de la science de la matière. Elle signifiera que, à toute matière, il faut attribuer une origine commune. Mais alors les deux parties de l’atome d’hydrogène, le noyau positif ou proton et l’électron négatif, constitueront, avec le quantum d’action, les pierres avec lesquelles tout l’édifice du monde physique sera considéré comme bâti et ces grandeurs, tant qu’elles ne pourront être ramenées l’une à l’autre, ou toutes les deux à une troisième, auront nécessairement un caractère absolu. Et voilà l’absolu retrouvé, à un échelon plus élevé cette fois, et sous une forme plus simple. Poursuivant notre