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Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/144

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examen, nous aborderons maintenant les fondements mêmes de l’édifice majestueux de la relativité. Suivant Newton, puis Kant, nos concepts du temps et de l’espace sont des formes absolues a priori de notre intuition. Pour la théorie de la relativité, en raison de l’arbitraire inhérent au choix du système de référence et du système de mesure, il convient de donner, en quelque façon, à ces notions un caractère seulement relatif, et c’est là, sans doute, une idée qui touche au tréfonds de notre connaissance en physique. Mais, si l’espace et le temps perdent leur caractère d’absolu, ce dernier n’est pas le moins du monde expulsé de l’univers. Il s’est retiré plus loin, je veux dire dans la métrique du continu à quatre dimensions qui unit espace et temps, par l’intermédiaire de la vitesse de la lumière. Cette métrique se présente, en effet, comme quelque chose où il n’y a plus trace d’arbitraire et qui est pleinement indépendante de tout le reste, c’est-à-dire comme un absolu.

Ainsi donc, la théorie de la relativité, si souvent mal comprise, non seulement n’a pas supprimé l’absolu, mais encore elle a fait ressortir mieux que jamais combien la physique est liée à un monde extérieur absolu. Si l’absolu ne se trouvait que dans nus impressions personnelles, comme le veulent certains théoriciens de la connaissance, il y aurait, en principe, autant de physiques qu’il y a de physiciens et, dans ces conditions, rien de plus stupéfiant que de constater qu’il est encore possible de nos jours d’élaborer une physique dont le contenu est identique pour toutes les intelligences des savants, malgré la diversité de leurs impressions individuelles. En ces temps où le courant des idées positivistes est si fort, il ne va pas de soi, et il convient, au contraire, de faire remarquer, que ce n’est pas nous qui créons le monde extérieur pour des raisons de commodité ; mais que c’est le monde extérieur qui s’impose à nous avec la puissance irrésistible des forces élémentaires. En tâchant de libérer nos idées sur les phénomènes naturels de tout ce qu’elles ont d’individuel, de conventionnel, de fortuit, nous cherchons l’autonome derrière le dépendant, l’absolu derrière le relatif, l’immuable derrière le changeant. Autant que je puis m’en rendre compte, cette tendance s’observe, non seulement en physique, mais dans toutes les autres sciences ; que dis-je, elle