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Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/148

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un autre domaine très éloigné en apparence du premier. C’est là un très bon signe ; car on peut en conclure qu’elle est l’expression d’une loi ayant un sens profond et exprimant une relation particulièrement intime et inhérente à la nature des choses. On peut donc s’attendre dans ce cas à un véritable progrès dans notre connaissance du monde.

Si donc une hypothèse appropriée est indispensable dans tout travail de recherche inductive, il est impossible de ne pas se demander comment on peut arriver à trouver de telles hypothèses. Malheureusement il n’existe pas de prescriptions générales à cet égard. La logique seule est insuffisante, même quand y est jointe la possession du trésor d’expérience le plus riche et le plus varié. Ce qui importe ici, c’est plutôt l’intuition immédiate, l’inspiration heureuse. Très souvent il s’agira d’un rapprochement de pensées, paraissant au premier abord très osé, qui ne saurait être l’œuvre que d’une imagination créatrice vivante et originale, guidée par une connaissance exacte des faits.

Dans la plupart des cas, il s’agit de l’apparition de certaines analogies d’images, préparant à des transpositions d’un domaine dans un autre et inclinant les esprits dans le sens d’un nouveau pas en avant vers l’unification de nos conceptions sur l’univers.

Voici donc le savant parvenu à un point où s’ouvrent pour lui les perspectives les plus brillantes et pourtant, en cet instant, un grave danger le guette. En effet, même si le pas difficile a été heureusement franchi, même si la nouvelle hypothèse a prouvé sa fécondité, il n’en faut pas moins lui donner tout le développement qu’elle comporte et, aussi, en lui trouvant une formule appropriée, extraire ce qui en constitue le noyau substantiel, après élimination de tous les accessoires plus ou moins accidentels. Or ce n’est pas là une besogne aussi simple qu’il pourrait le paraître au premier abord. Le rapprochement d’idée heureux qui a permis de jeter un pont donnant accès à un nouveau domaine dans l’ordre de nos connaissances, doit, en général, être regardé comme une construction provisoire, destinée à être remplacée peu à peu par une construction plus solide, capable de supporter le feu de cette grosse artillerie qu’est la logique des critiques.