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Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/51

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ment sur ce point, il est indispensable à tout homme qui s’intéresse vraiment au but de la science de prendre position sur cette question.

Il y a 35 ans, Hermann Helmholtz disait que nos perceptions ne nous donnent qu’une transposition symbolique et jamais une représentation fidèle du monde extérieur. Nous ne possédons, en effet, aucun moyen permettant de démontrer l’existence d’une similitude entre les caractéristiques d’un phénomène extérieur et les caractéristiques de la sensation que ce phénomène éveille en nous. Toutes idées que nous avons sur le monde extérieur ne reflètent, en dernière analyse, que vos propres sensations. Dans ces conditions, il est permis de se demander s’il y a un sens à parler d’un moi conscient par opposition à une « nature en soi » indépendante de lui. Est-ce que ce que l’on appelle « lois naturelles » ne serait pas, au fond, un ensemble de règles plus ou moins parfaites ayant pour but de résumer aussi exactement que possible la succession temporelle de nos sensations ? Si l’on admet que telle soit la vérité, il faut en conclure que, non seulement le sens commun de l’humanité, mais encore les conceptions des savants eux-mêmes auraient fait fausse route. L’histoire tout entière du développement de la connaissance en physique nous montre que celui-ci a toujours lieu dans le sens d’une séparation, en principe, aussi complète que possible, entre les phénomènes du monde extérieur et les phénomènes sensoriels qui ont lieu dans l’être humain.

Il y a fort heureusement un moyen d’échapper très vite à cette difficulté captieuse, c’est de continuer jusqu’au bout dans la voie où nous avons commencé. Nous admettrons donc pour le moment que nous soyons en possession : d’une représentation de l’univers tout à fait satisfaisante, grâce à laquelle, par conséquent, il est possible de rendre parfaitement compte de toutes les lois naturelles découvertes empiriquement. On ne peut pas, c’est entendu, prouver que cette représentation soit conforme, même tant soit peu, à la « nature réelle ». Mais cette proposition à une contre-partie à laquelle on ne pense malheureusement pas assez : c’est qu’il n’est pas davantage possible de prouver que notre représentation ne reproduit pas d’une manière absolument fidèle les traits de la « nature réelle ». Pour