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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/105

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CINQUIÈME ENNÉADE.


ligence, elle devient semblable à la puissance dont elle procède ; en sortant de l’intelligence, elle devient différente d’elle ; cependant, elle garde encore quelque ressemblance avec elle, soit qu’elle agisse, soit qu’elle produise. En agissant, elle contemple encore ; en produisant, elle produit des formes, qui sont comme des pensées éloignées, des vestiges de la Pensée et de l’Intelligence, vestiges qui sont conformes à l’archétype, et qui en offrent une imitation fidèle, ou qui du moins en conservent encore une image affaiblie, s’ils n’occupent que le dernier rang des êtres.

VIII. Quelle nature l’intelligence découvre-t-elle dans l’intelligible ? Quelle nature découvre-t-elle en elle-même par la contemplation ? — D’abord, pour l’intelligible, il ne faut pas se le représenter avec une figure ni avec des couleurs comme les corps. Il existe avant eux. Les raisons séminales (ὁ λόγος ὁ ἐν τοῖς σπέρμασι (ho logos en tois spermasi)) qui produisent la figure et la couleur ne leur sont pas identiques : car elles sont invisibles. Les choses intelligibles le sont à plus forte raison : leur nature est identique à celle des principes en qui elles résident, comme les raisons séminales sont identiques à l’âme qui les contient. Mais l’âme ne voit pas les choses qu’elle possède, parce qu’elle ne les a pas engendrées ; elle n’est, ainsi que les raisons, qu’une image [de l’intelligence]. Le principe dont elle vient a une existence évidente, véritable, première : aussi existe-t-il de lui-même et en lui-même. Mais cette image [qui est dans l’âme] n’est même pas permanente si elle n’appartient à une autre chose et qu’elle y demeure. En effet, le propre d’une image est d’être en autrui, puisqu’elle appartient à autrui, à moins qu’elle ne reste attachée à son principe. Aussi ne contemple-t-elle pas, parce qu’elle n’a pas une lumière suffisante, et, contemplât-elle, comme c’est en autrui qu’elle trouve sa perfection, c’est autrui qu’elle contemplerait au lieu de se contempler elle-même. Il n’en est pas de même dans l’intelligence : la chose contemplée et la contemplation y