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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/318

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LIVRE TROISIÈME.

le mouvement mesuré, et alors il sera dans le mouvement comme dans un sujet, tandis que le mouvement sera lui-même dans la chose mue ; ou bien le temps sera ce qui mesure [l’âme ou l’instant présent[1]], et alors il sera dans ce qui mesure comme dans un sujet. Quant au lieu, comme il est la limite de ce qui contient, il sera également dans ce qui contient[2]. Il en est tout autrement de la substance que nous considérons ici. Il faut donc faire consister la substance, soit dans une, soit dans plusieurs, soit dans toutes les propriétés dont nous parlons, parce que ces propriétés conviennent à la fois à la matière, à la forme et au composé.

VI. Vous avez indiqué les propriétés de la substance, dira-t-on peut-être, mais vous n’avez pas dit ce qu’elle est. — C’est demander à voir ce qu’est la substance sensible ; or la substance sensible est, et être n’est pas une chose qui se voie. — Quoi donc ? Le feu et l’eau ne seraient pas des substances ? — Sans doute, le feu et l’eau sont des substances. Mais est-ce parce qu’ils sont visibles ? Non. Est-ce parce qu’ils contiennent de la matière ? Non. Est-ce parce qu’ils ont une forme ? Non. Est-ce enfin parce qu’ils sont des composés ? Non encore. Ils sont des substances parce qu’ils sont. — Mais on dit de la quantité qu’elle est ; on le dit aussi de la qualité. — Oui, sans doute, mais si nous parlons ainsi pour la quantité et la qualité, ce n’est que par homonymie[3]. — Alors, en quoi consiste l’être de la

  1. Voy. ci-dessus p. 159-160.
  2. Voy. ci-après p. 267-268.
  3. « Être signifie ou bien l’essence, la forme déterminée (la quiddité, τί ἐστι ϰαὶ τόδε τι (ti esti kai tode ti)), ou bien la qualité, la quantité, ou chacun des autres attributs de cette sorte. Mais parmi ces acceptions si nombreuses de l’être, il est une acception première ; et l’être premier c’est sans contredit la forme distinctive, c’est-à-dire l’essence. En effet, lorsque nous attribuons à un être telle ou telle qualité, nous disons qu’il est bon ou mauvais, etc., et non point qu’il a trois coudées ou que c’est un homme ; lorsque nous voulons au contraire exprimer sa nature, nous ne disons pas qu’il