Aller au contenu

Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
275
LIVRE TROISIÈME.

essentielle ; de même et à plus forte raison, quand je considère des figures, je considère en elles des différences de grandeur. Si ce n’étaient pas des différences de grandeur, de quoi seraient-elles donc des différences ? Si ce sont des différences de grandeur, les grandeurs différentes qui proviennent des différences de grandeur doivent être placées dans les espèces qu’elles forment [quand on les considère sous le rapport de la quantité].

XV. Mais comment la propriété de la quantité est-elle d’être dite égale et inégale[1] ? Ne dit-on pas de deux triangles qu’ils sont semblables ? Ne pourra-t-on dire aussi que deux grandeurs sont semblables ? — Sans doute : ce qu’on nomme similitude [en parlant de la qualité[2]] n’empêche pas qu’il y ait similitude et dissimilitude dans le genre de la quantité[3]. Ici, en effet, le mot similitude s’applique aux grandeurs dans un autre sens qu’à la qualité. En outre, si [Aristote] a dit que la propriété spéciale aux quantités est de pouvoir être dites égales et inégales, il n’a pas défendu d’affirmer de quelques-unes qu’elles sont semblables. Mais puisqu’il a dit que la propriété spéciale aux qualités est de pouvoir être dites semblables et dissemblables, il faut, comme nous l’avons déjà expliqué, prendre le terme de semblable dans un autre sens quand

  1. « La propriété la plus spéciale de la quantité, c’est d’être dite égale et inégale. En effet, on peut dire de chacune des quantités dont nous avons parlé qu’elle est égale et inégale : le nombre, le temps est dit égal et inégal. » (Aristote, Catégories, II, chap. VI, § 26 ; trad. de M. Barthélemy Saint-Hilaire, p. 79.) Voy. aussi ci-dessus liv. I, § 5, p. 160.
  2. « La propriété spéciale aux qualités, c’est de pouvoir être dites semblables et dissemblables : une chose est semblable à une autre parce qu’elle est qualifiée d’une certaine manière ; donc, le propre de la qualité, c’est que semblable et dissemblable s’appliquent à elle. » (Aristote, Catégories, II, chap. VIII, § 30 ; trad. fr., p. 105.)
  3. Il y a dans les textes imprimés : ἐν τῷ ποιῶ (en tô poiô). La suite des idées exige absolument qu’on lise ποσώ (posô), comme le fait Ficin, qui traduit : in genere quantitatis.