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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/393

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SIXIÈME ENNÉADE.

point renfermerait une infinité de points [séparés], et ne saurait être continu, ni par conséquent se proportionner à l’univers. Si donc toute masse corporelle possède l’Être qui est présent partout, elle doit le posséder tout entier dans toutes les parties qui la composent.

XIV. Mais si une seule et même Âme est en chacun, comment chacun a-t-il son âme propre ? Comment telle âme est-elle bonne, et telle autre mauvaise ? — C’est que l’Âme universelle communique la vie à chacun, qu’elle contient toutes les âmes et toutes les intelligences[1]. Elle possède à la fois l’unité et l’infini : elle renferme en son sein toutes les âmes, distinctes d’elle chacune, mais non séparées[2] ; sinon, comment l’Âme posséderait-elle l’infini ? On peut encore dire que l’Âme universelle contient toutes choses à la fois, toutes les vies, toutes les âmes, toutes les intelligences, que celles-ci ne sont pas circonscrites chacune par des limites, et que c’est pour cela qu’elles forment une unité. En effet, il fallait qu’il y eût dans l’Âme universelle une vie non-seulement une, mais encore infinie, et cependant une : il fallait que cette vie une fût une en tant qu’elle était toutes les vies, que celles-ci ne se confondissent pas dans cette unité, mais qu’elles en partissent et qu’en même temps elles restassent là d’où elles étaient parties ; ou plutôt, elles ne sont point parties du sein de l’Âme universelle, elles ont toujours subsisté dans le même état. En effet, rien n’est engendré dans l’Âme universelle : elle ne se divise pas réellement, elle ne paraît divisée qu’à l’égard de ce qui la reçoit ; tout demeure en elle tel qu’il a toujours été.

  1. « Les choses qui sont dans l’Être universel (ἐν τοῖς ὅλοις (en tois holois)) sont-elles à la fois en nous et dans l’Âme universelle ? Comment y a-t-il une Âme universelle et des âmes particulières ? Porphyre et Jamblique s’expriment de même sur ce point : ils disent que tout est partout, mais d’une manière différente dans chaque être différent. » (Olympiodore, Commentaire sur le Philèbe, éd. Stallbaum, p. 261.)
  2. Voy. Enn. IV, liv. VIII, § 3 ; t. II, p. 482.