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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/460

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LIVRE SIXIÈME.

en soi une unité ; mais [en les nombrant] vous engendrez en vous le nombre, vous concevez une certaine quantité, la dyade. Si vous dites [comme les Pythagoriciens] que la vertu est une tétrade, elle est une tétrade en tant que ses parties [la justice, la prudence, le courage, la tempérance[1]] concourent à former une unité ; vous pouvez ajouter que cette tétrade est une unité, en tant qu’elle est une espèce de substance ; quant à vous, vous rapprochez cette tétrade de celle qui est en vous[2].

XVII. En quel sens peut-on dire qu’un nombre est infini[3] ? car les raisons que vous venez d’exposer conduisent à admettre que tout nombre est limité. — Cette conclusion est juste : car il est contraire à la nature du nombre d’être infini. — Pourquoi donc dit-on souvent qu’un nombre est infini ? Est-ce dans le sens où l’on dit qu’une ligne est infinie ? — Si nous disons qu’une ligne est infinie, ce n’est point qu’il y ait réellement une ligne de cette espèce, c’est pour faire concevoir une ligne aussi grande que possible, plus grande que toute ligne donnée[4]. Il en est de même du

  1. Voy. le livre II de l’Ennéade I, Des Vertus. Macrobe dit à ce sujet : « Quaternarium quidem Pythagorei, quem τετραϰτὴν (tetraktên), adeo quasi ad perfectionem animæ pertinentem inter arcana venerantur ut ex eo et jurisjurandi religionem sibi fecerint : Juro tibi per eum qui dat animœ nostrœ quaternarium numerum. » (Commentaire du Songe de Scipion, liv. I, chap. 5.)
  2. Pour plus de détails sur ce point, Voy. le livre de Jamblique περὶ ϰοινῆς μαθηματιϰῆς ἐπιστήμης (peri koinês mathêmatikês epistêmês).
  3. Plotin revient ici à la question de l’infini dont il a déjà traité ci-dessus, § 2, p. 365.
  4. Voici la démonstration que Proclus donne de cette vérité. Nous empruntons la traduction de ce morceau au savant M. Vincent : « Maintenant, de savoir comment, d’une manière absolue, l’infini peut exister en substance, c’est une question digne d’examen. D’abord donc, que, dans les êtres sensibles, il n’y ait aucune grandeur infinie suivant aucune dimension, c’est une chose évidente. Il n’est pas admissible, par exemple, que ce qui se meut circulairement soit infini ; et il en est de même en général de toute espèce de corps, puisque, dans ces divers cas, le lieu est limité. Mais de