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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/562

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LIVRE HUITIÈME.

nature simple, qu’il est un acte un, qu’il n’est pas autre en puissance qu’il n’est en acte, comment ne serait-il pas libre ? On ne peut dire de lui qu’il agit conformément à sa nature, parce que son acte n’est pas différent de son essence, qu’être et agir ne font qu’un en lui. S’il n’agit donc ni pour un autre ni dans la dépendance d’un autre (οὐϰ ἐφ’ ἑτέρῳ (ouk eph’ heterô)), comment ne serait-il pas libre ? Si le terme d’indépendance (ἐπ’αὐτῷ (ep’ autô)) ne convient pas ici, s’il est trop faible, il fait du moins comprendre que ce principe ne dépend pas d’un autre, ne l’a pas pour maître de son action, pas plus que de son essence, puisqu’il est lui-même principe (ἀρχή (archê)). En effet, si l’intelligence a un principe autre qu’elle, du moins elle n’a pas ce principe hors d’elle, elle l’a dans le Bien même [auquel elle s’attache]. Si donc c’est dans le Bien même qu’elle trouve son bien, à plus forte raison encore elle possède elle-même l’indépendance (τὸ ἐπ’αὐτῷ (to ep’ autô)) et la liberté (τὸ ἐλεύθερον (eleutheron)), puisqu’elle ne les recherche qu’en vue du bien. Quand donc l’intelligence agit conformément au bien, elle a un plus haut degré d’indépendance : car elle a déjà la conversion vers le Bien, parce qu’elle procède de lui[1], et le privilége d’être en soi (τὸ ἐν αὑτῷ (to en hautô)), parce qu’elle est tournée vers lui ; or il est meilleur pour l’Intelligence d’être en elle-même, puisqu’elle est ainsi tournée vers le Bien[2].

V. La liberté (τὸ αὐτεξούσιον (to autexousion)) et l’indépendance (τὸ ἐπ’ αὐτῷ (to ep’ autô)) ne se trouvent-elles que dans l’intelligence pure et en tant qu’elle pense, ou se trouvent-elles aussi dans l’âme qui applique son activité contemplative à l’intelligence et son activité pratique à la vertu ? — Si nous accordons la liberté à l’activité pratique de l’âme, nous ne l’étendrons pas à

  1. Kirchhoff lit ici ἐξ αὐτοῦ ὁρμώμενον (ex autou hormômenon), qui procède du Bien, au lieu de ἐξ αὐτοῦ ὁρώμενον (ex autou horômenon), leçon suivie par Ficin, qui traduit ex ipso perspectum ; nous avons suivi la leçon de Kirchhoff.
  2. Kirchhoff retranche la fin de cette phrase, parce qu’il y voit une répétition de ce qui précède.