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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/585

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SIXIÈME ENNÉADE.

lui-même suprême (ὑπέρτατος (hupertatos)), il a toutes choses sous son obéissance. Il n’est pas contingent pour elles ; ce sont elles qui sont contingentes pour lui, ou plutôt qui se rapportent à lui : car Lui, il ne les regarde pas ; ce sont elles qui le regardent. Quant à Lui, il se porte en quelque sorte vers les profondeurs les plus intimes de lui-même, s’aimant lui-même, aimant la pure clarté qui le constitue, étant lui-même ce qu’il aime, c’est-à-dire se donnant l’existence à lui-même (ὑποστήσας ἑαυτόν (hupostêsas heautôn)), parce qu’il est un acte immanent (ἐνέργεια μένουσα (energeia menousa)), et que ce qu’il y a de plus aimable en lui constitue une sorte d’intelligence (οἶον νοῦς (oion nous)). Cette intelligence étant une œuvre (ἐνέργημα (energêma)), il est lui-même une œuvre ; mais comme il n’est pas l’œuvre d’un autre principe, il est l’œuvre de lui-même ; il est donc, non comme le fait le hasard, mais comme il agit. Si l’on peut dire qu’il existe surtout parce qu’il est à lui-même son propre fondement, qu’il se regarde lui-même, que son existence consiste à se regarder lui-même (si je puis m’exprimer ainsi), il est l’auteur de lui-même. Il est donc, non ce qu’il s’est trouvé être fortuitement, mais ce qu’il veut être lui-même, et comme sa volonté n’a elle-même rien de fortuit, il est encore sous ce rapport indépendant de la contingence : car, puisque sa volonté est la volonté de ce qu’il y a de meilleur dans l’univers, elle ne saurait être fortuite. Que son inclination vers lui-même (νεῦσις πρὸς αὑτόν (neusis pros hauton)), inclination qui est son acte, et que son immanence en lui-même (μονὴ ἐν αὑτῷ (monê en hautô)) le fassent être ce qu’il est, c’est ce qu’on reconnaîtra aisément si l’on suppose un moment le contraire. En effet, que Dieu incline vers ce qui est hors de lui, il cessera d’être ce qu’il est. Être ce qu’il est, voilà son acte par rapport à lui-même ; lui et cet acte ne font qu’un. Il se donne ainsi l’existence

    cunt. Est igitur Deus ipsum ubique, in quo sont omnia, non locali expansione, sed essentiali adhæsione. » (Dogmata theologica, t. I, p. 247.)