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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/666

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SIXIÈME ENNÉADE, LIVRE VIII.

rompu dans la doctrine péripatéticienne, il nous montre comment Dieu est cause suprême, et comment, par l’effusion volontaire de sa souveraine puissance, il produit, en s’aimant lui-même de cet amour qui fait sa béatitude, tous les êtres qui doivent naître de lui (p. 524-539). Jamais avant Plotin, il faut le reconnaître, la philosophie ancienne ne s’était élevée à une conception aussi sublime de Dieu.

Malgré son extrême importance, ce livre n’a pas été, autant que nous sachions, cité par les successeurs de Plotin. Cependant ils se sont bornés à enseigner la théorie du maître à ce sujet. Il nous suffira de donner pour preuve ces lignes d’Olympiodore :

« Plus notre liberté obéit aux dieux, et plus elle étend son empire ; plus elle s’éloigne des dieux et s’isole en elle-même, et plus elle fait de pas vers l’asservissement à un principe étranger, comme s’étant écartée de l’être essentiellement libre et s’étant rapprochée de l’être essentiellement dépendant. » (Olympiodore, Comm. sur le Phédon, dans M. Cousin, Fragments de philosophie ancienne, p. 429.)

Quant aux Pères de l’Église, outre le rapprochement que nous avons signalé entre saint Augustin et Plotin (p. 513-514), nous remarquerons qu’une des idées principales développées par Plotin, à savoir que Dieu s’est donné l’être à lui-même (p. 531-534), se retrouve en termes presque identiques dans Lactance, qui s’exprime en ces termes :

« Verum, quia fieri non potest quin id quod sit [alii Codices quod factum sit] aliquando esse cœperit ; consequens est ut, quando nihil ante illum fuit, ipse ante omnia ex se ipso sit procreatus ; ideoque ab Apolline αὐτοφυὴς (autophuês), a Sibylla αὐτογενὴς (autogenês) et ἀγέννητος (agennêtos) et ἀποίητος nominatur, quod Seneca, homo acutus, in Exhortationibus vidit : « Nos, inquit, aliunde pendemus. Itaque ad aliquem respicimus, cui, quod est optimum in nobis, debeamus. Alius nos edidit, alius instruxit ; Deus se ipse fecit. »… Ex se ipso est, ut in primo diximus libro, et ideo talis est qualem esse se voluit, impassibilis, immutabilis, incorruptus, beatus, œternus. » (Divinœ institutiones, II, 7, et 8.)

Le P. Thomassin a résumé dans ses Dogmata theologica quelques-unes des principales idées développées ici par Plotin. (Voy. ci-dessus p. 518, 523, 534, notes).

Enfin, on retrouve les idées fondamentales de ce livre dans le morceau suivant d’Ibn-Gébirol qui a dû connaître notre auteur par des intermédiaires :

« Les formes sont plus parfaites dans les causes que dans les effets : car elles naissent dans les effets parce que les causes regardent les effets et se trouvent en face d’eux. D’après cela, il faut que