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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/181

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maison de Domitius, Pompée et Crassus furent proclamés consuls. Bientôt après ce fut un nouvel acte de violence : ils environnèrent de gens armés la salle du Sénat ; et, après avoir chassé Caton du Forum et tué plusieurs citoyens qui le soutenaient, ils firent continuer à César son commandement pour cinq autres années, et se firent décerner à eux-mêmes pour provinces la Syrie et les deux Espagnes. Puis ils les tirèrent au sort : la Syrie échut à Crassus, et le gouvernement des Espagnes à Pompée.

Tous apprirent avec plaisir le résultat du sort. La foule désirait que Pompée ne fût pas éloigné de la ville ; et Pompée, amoureux de sa femme, était bien aise de rester auprès d’elle le plus possible. Crassus fit paraître tant de joie de la décision du sort, qu’il semblait regarder cette bonne fortune comme la plus grande qui lui fût jamais arrivée. Avec des étrangers, et en public, c’est à peine s’il pouvait se contenir ; avec les personnes de sa société, il se laissait aller à de vains discours, et qui ne convenaient qu’à un jeune homme, et non à son âge et à son caractère ; car jamais il n’avait été vaniteux ou fanfaron. Mais alors il se laissa tout à fait emporter et aveugler : ses succès ne devaient plus se borner à la Syrie, ni aux Parthes ; mais il allait montrer que les exploits de Lucullus contre Tigrane, de Pompée contre Mithridate, n’étaient que des jeux d’enfants ; et il s’élançait en espérance jusque dans la Bactriane, dans l’Inde, et jusqu’à la mer extérieure. Cependant le décret concernant le partage ne comprenait point la guerre parthique ; mais tout le monde savait que c’était l’idée fixe de Crassus. César même lui écrivait de la Gaule, pour louer son projet et l’exciter à cette guerre.

Mais le tribun Atéius voulait s’opposer à son départ ; et à lui se joignaient beaucoup de personnes qui trouvaient mauvais qu’on s’en allât faire la guerre à des gens