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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/384

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portait à Démétrius, en supportant lui-même patiemment ses insolences sans jamais se fâcher. On assure, en effet, que souvent, tandis que Pompée attendait les convives qu’il avait priés à souper, et s’occupait de leur faire accueil, Démétrius était déjà assis à table, le bonnet sur la tête[1], arrogamment enfoncé jusqu’au-dessous des oreilles. Avant même son retour en Italie, il avait acquis les plus belles maisons de campagne des environs de Rome, et les plus beaux parcs pour les exercices ; il avait des jardins magnifiques, qu’on appelait les jardins de Démétrius ; au lieu que Pompée, jusqu’à son troisième triomphe, était logé d’une façon simple et modeste. Ce ne fut qu’après avoir construit ce théâtre splendide et renommé, qu’il se fit bâtir, comme un accessoire à cet édifice, une maison plus belle que la première, mais qui n’était pas faite pour exciter L’envie. Aussi, celui qui en fut le maître après Pompée fut tout étonné en y entrant, et demanda où donc soupait le grand Pompée : c’est là, du moins, ce qu’on raconte.

Le roi de l’Arabie Pétrée, qui n’avait pas fait jusque-là grand compte de la puissance romaine, effrayé à l’approche de Pompée, lui écrivit qu’il était disposé à lui obéir en tout ce qui serait à son gré. Pompée, pour l’affermir dans sa résolution, mena son armée devant Pétra. Mais cette expédition fut généralement blâmée ; on n’y vit qu’un prétexte pour cesser de poursuivre Mithridate : « Il fallait, disait-on, que Pompée tournât toutes ses forces contre l’ancien antagoniste de Rome, qui commençait à rallumer la guerre, et qui s’apprêtait, d’après les nouvelles qu’on avait reçues du Bosphore, à traverser la Scythie et la Péonie[2], pour envahir l’Italie avec son armée. » Mais Pompée, persuadé qu’il était plus facile de ruiner

  1. Les affranchis portaient le bonnet.
  2. Province de la Macédoine.