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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/385

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sa puissance en lui laissant continuer la guerre que de s’emparer de sa personne dans la fuite, ne voulait pas s’amuser sans fruit à le poursuivre, et cherchait, pour gagner du temps, à faire d’autres expéditions en attendant le moment favorable. Mais la Fortune trancha la difficulté. Il n’était pas loin de Pétra, et venait d’asseoir son camp pour ce jour-là : comme il s’exerçait hors des retranchements à faire manœuvrer un cheval, il vit arriver du royaume de Pont des courriers qui apportaient d’heureuses nouvelles. On le reconnut incontinent aux lauriers qui, en pareil cas, entourent, selon la coutume des Romains, la pointe de leurs javelines. Les soldats, les ayant aperçus, accoururent auprès de Pompée. Il voulait, avant de donner audience aux courriers, achever son exercice ; mais les soldats le supplièrent à grands cris d’y surseoir un instant. Il descendit donc de cheval, prit les dépêches, et entra dans le camp. Il n’y avait point de tribunal dressé ; et les soldats n’eurent pas la patience d’en élever un à leur ordinaire, en coupant d’épaisses mottes de terre et en les entassant les unes sur les autres : dans leur curiosité et leur impatience de savoir des nouvelles, ils amoncelèrent les bâts des bêtes de somme, et en firent un tribunal. Pompée y monte, et leur annonce que Mithridate est mort ; que la révolte de son fils Pharnace l’a porté à se tuer lui-même ; que Pharnace s’est emparé de tous les États de son père, et qu’il lui mande, dans ses lettres, qu’il en a pris possession en son nom et au nom des Romains.

Aussitôt l’armée se livre aux transports d’une joie bien naturelle ; on fait des sacrifices et des festins, comme s’il était mort, dans la personne de Mithridate, un nombre infini d’ennemis. Pompée, ayant mis à ses exploits une fin beaucoup plus facile qu’il n’avait pu l’espérer, partit de l’Arabie, et traversa d’une marche rapide les provinces qui la séparent de la Galatie, pour se rendre à Amisus.