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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/503

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fil de l’épée, eux, leurs femmes et leurs enfants. Les Barbares le lui ramenèrent, et remirent leurs villes à sa discrétion. Alexandre les traita tous avec humanité, et paya la rançon du cheval à ceux qui l’avaient pris.

De l’Hyrcanie il entra dans la Parthie ; et, comme il s’y trouvait de loisir, il prit pour la première fois l’habillement des Barbares, soit qu’il crût que cette conformité aux lois et aux coutumes du pays serait le plus puissant moyen d’en apprivoiser les habitants, soit qu’il cherchât à sonder les Macédoniens sur l’usage de l’adoration qu’il voulait introduire parmi eux, en les accoutumant peu à peu à changer leurs mœurs nationales contre les manières des vaincus. Toutefois, il n’adopta pas tout le costume des Mèdes, qui était par trop étrange et barbare : il ne prit ni les larges braies, ni la robe traînante, ni la tiare ; il se fit un habillement qui tenait le milieu entre celui des Perses et celui des Mèdes, moins fastueux que le dernier, mais plus majestueux que l’autre. Il ne s’en servit d’abord que lorsqu’il parlait aux Barbares, ou quand il était en particulier avec ses plus intimes amis. Il le porta ensuite quand il sortait en public, ou chez lui quand il donnait ses audiences. Ce spectacle affligeait vivement les Macédoniens ; mais l’admiration dont ils étaient remplis pour ses autres vertus les rendait indulgents sur ce qu’il donnait au plaisir et à la vanité, lui qui, déjà couvert de cicatrices, venait encore d’être blessé d’une flèche, qui lui avait cassé et fait tomber le petit os de la jambe ; qui, dans une autre occasion, avait été frappé au col d’une pierre, dont le coup lui avait causé un long éblouissement ; et qui ne cessait, malgré tous ces accidents, de s’exposer, sans ménagement, au danger.. Tout récemment encore, il avait passé le fleuve Orexartès[1], qu’il prenait pour le Tanaïs ; il avait mis en

  1. Qui prend sa source au mont Caucase, et se décharge dans la mer Caspienne.