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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/561

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premier qui imagina de communiquer par lettres avec ses amis, lorsque des affaires pressées ne lui permettaient pas de s’aboucher avec eux, ou que le grand nombre de ses occupations et l’étendue de la ville ne lui en laissaient pas le temps.

Voici un trait remarquable du peu de façon qu’il faisait dans son vivre. Valérius Léo, son hôte à Milan, lui donnait à souper : on servit un plat d’asperges assaisonnées avec de l’huile de senteur, au lieu d’huile d’olive. Il en mangea sans avoir l’air de s’en apercevoir, et gronda fort ses amis, qui témoignaient tout haut leur mécontentement. « Ne vous suffisait-il pas de n’en point manger, si vous ne les trouviez pas bonnes ? Relever ce défaut de savoir-vivre, c’est ne pas savoir vivre soi-même. » Surpris dans un de ses voyages par un orage violent, il fut obligé de chercher une retraite dans la chaumière d’un pauvre homme, où il ne trouva qu’une petite chambre, à peine suffisante pour une seule personne. « Il faut, dit-il à ses amis, céder aux grands les lieux les plus honorables ; mais les plus nécessaires, il faut les laisser aux plus malades. » Et il fit coucher Oppius dans la chambre. Pour lui, il passa la nuit avec les autres sous l’auvent du toit, devant la porte.

Les premiers peuples auxquels il eut affaire dans les Gaules, furent les Helvétiens et les Tigurins[1]. Ils avaient brûlé les douze villes et les quatre cents villages de leur dépendance, et ils s’avançaient pour traverser la partie des Gaules qui était soumise aux Romains, comme autrefois les Cimbres et les Teutons, et non moins redoutables, semblait-il, et par leur audace et par leur multitude : ils comptaient trois cent mille hommes, dont quatre-vingt-dix mille en état de combattre. César ne marcha pas en

  1. Les Tigurins habitaient le pays qui est aujourd’hui le canton de Zurich.