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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/72

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cela, l’opinion libérale d’une grande partie de la Russie, notamment de Moscou. C’est une erreur grave, qui peut être suivie un jour de sérieux dangers. » M. Isvolsky paraît ce soir très pessimiste. Il se garde d’incriminer l’Empereur ou personne de son entourage ; il parle avec une discrétion voulue ; mais il est visiblement obsédé par le souvenir des troubles populaires dont il a été le témoin et, s’il paraît hostile à la réaction, ce n’est pas qu’elle lui déplaise en elle-même, c’est qu’il la croit capable de ramener, par maladresse, la révolution.


Dimanche 15 février

En revenant du Gymnase Japy où j’ai assisté à une belle fête corporative donnée par l’Association des instituteurs, je trouve sur mon bureau des télégrammes communiqués par le ministère de l’Intérieur. MM. Barthou et Briand sont allés au Havre de conserve et y ont prononcé de grands discours politiques. Cette intervention oratoire ayant été annoncée à la population, par quelques groupes avancés, comme une manifestation réactionnaire, les dockers, qui m’ont fait, l’an dernier, sous le cabinet Barthou, une réception très chaleureuse, ont, au contraire, monté aujourd’hui une cabale contre les deux anciens Présidents du Conseil. Ils ont acheté des centaines de sifflets et préparé de savantes démonstrations d’hostilité. Dans leur ensemble, les habitants ne se sont pas associés à une offensive qui n’était sans doute pas très spontanée et, à la salle Franklin, MM. Briand et Barthou ont été acclamés par leur auditoire, lorsqu’en termes vigoureux ils se sont élevés contre ceux qui cherchent à obtenir des prochaines élections générales,