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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/89

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la nervosité dont je viens d’être témoin dans mon cabinet. Il se bride avec une étonnante maîtrise. À peine un peu de rouge s’obstine-t-il sur la nuque et sur le visage. Le ministre expose le plan financier qu’il compte soumettre à la Chambre : projet d’impôt général et complémentaire sur le revenu, avec déclaration non contrôlée ou contrôlée à l’aide des seuls renseignements dont dispose aujourd’hui l’administration ; incorporation dans la loi de finances de cet impôt sur la rente que le cabinet Barthou a vainement essayé de combattre. Quelques membres du gouvernement présentent de timides observations, mais M. Caillaux écarte toutes les objections d’un mot ou d’un revers de main.

Me Maurice Bernard, toujours empressé à rendre service et à tâcher d’apaiser les différends, vient au commencement de l’après-midi. Il se fait fort d’empêcher M. Gaston Calmette de publier une correspondance intime, à supposer que, contre toute vraisemblance, le rédacteur en chef du Figaro ait eu pareille intention. Il ira voir également M. Caillaux et se mettra tout à sa disposition.

À quatre heures de l’après-midi, M. Doumergue se fait annoncer à mon cabinet, où viennent le rejoindre MM. Briand et Barthou. Je fais remarquer à ces derniers que, si une publication du procès-verbal Fabre a lieu, leurs adversaires ne manqueront pas de leur attribuer la responsabilité de cette divulgation, puisqu’ils ont eu tous deux la pièce entre les mains, lorsqu’ils étaient gardes des Sceaux. Ils protestent l’un et l’autre de leur vif désir de conjurer ce scandale et se proposent d’intervenir sans retard.