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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/191

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précédente à ma maison d’Oru, avec si peu de suite qu’il ne paraissait pas douteux que ce ne fût pour se tenir à couvert.

« Je ne le crois coupable de rien, ajouta-t-il, et je ne lui ferai pas un crime de ses anciennes liaisons avec l’Aga des Janissaires. Mais j’avais jugé à propos de le faire observer, et je ne suis point fâché qu’il ait eu assez de frayeur pour devenir un peu plus circonspect dans le choix de ses amis. »

Il me donna sa parole, après ce discours, qu’il ne lui causerait aucun chagrin chez moi ; mais il me fit promettre de lui cacher ce qu’il m’apprenait, pour laisser durer quelque temps son inquiétude.

Il ne me devint pas plus aisé de comprendre que le Sélictar fût à Oru. J’en étais parti au milieu du jour. Quelle apparence qu’il y fût sans ma participation, et qu’il eût engagé mes domestiques à me faire un mystère de son arrivée ? Sa passion pour Théophé fut la première idée qui me vint à l’esprit. Ne penserait-il pas moins à la sûreté de sa vie qu’au succès de son amour ; et s’il était vrai, me dis-je à moi-même, qu’il fût caché dans ma maison depuis cette nuit, est-il vraisemblable qu’il n’y soit pas de concert avec Théophé ? Qu’on se forme l’idée qu’on voudra des sentiments que j’avais pour elle. Si l’on ne trouve pas que je méritasse la qualité de son amant, qu’on me regarde comme son gardien ou comme son censeur ; mais le moindre de ces titres suffi-