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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/27

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qu’après de longues épreuves ; et la seule singularité de voir un Français aussi Turc, si l’on me permet cette expression, que les habitants naturels du pays, m’attira dès les premiers jours des caresses et des distinctions dont on ne s’est jamais relâché. Le goût même que j’affectais de marquer pour les coutumes et les mœurs de la nation, servit encore à redoubler l’inclination qu’on avait pour moi. On alla jusqu’à s’imaginer que je ne pouvais avoir tant de ressemblance avec les Turcs sans être bien disposé pour leur religion ; et cette idée, achevant de me les attacher par l’estime, je me trouvai aussi libre et aussi familier dans une ville où j’avais à peine vécu deux mois, que dans le lieu de ma naissance.

Les occupations de mon emploi me laissaient tant de liberté pour me répandre au dehors, que je m’attachai d’abord à tirer de cette facilité tout le fruit qui convenait à la curiosité que j’avais de m’instruire. J’étais d’ailleurs dans un âge où le goût du plaisir s’accorde encore avec celui des affaires sérieuses, et mon projet, en faisant le voyage d’Asie, avait été de me partager entre ces deux inclinations. Les divertissements des Turcs ne me parurent point si étranges que je n’espérasse d’y être bientôt aussi sensible qu’eux. Ma seule crainte fut de trouver moins facilement à satisfaire le penchant que j’avais pour les femmes. La contrainte où elles sont retenues, et la difficulté qu’on