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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/30

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Il loua beaucoup ma réponse. Et, me confessant que divers exemples de la hardiesse des Français avaient fort mal disposé les Turcs pour les galants de cette nation, il n’en parut que plus satisfait de me trouver des sentiments si raisonnables. Sur le champ il m’offrit de m’accorder la vue de ses femmes. J’acceptai cette faveur avec empressement. Nous entrâmes dans un lieu dont la description est inutile à mon dessein. Mais je fus trop frappé de l’ordre que je vis y régner pour m’en rappeler aisément toutes les circonstances.

Les femmes du Bacha, qui étaient au nombre de vingt-deux, se trouvaient toutes ensemble dans un salon destiné à leurs exercices. Elles étaient occupées séparément, les unes à peindre des fleurs, d’autres à coudre ou à broder, suivant leurs talents ou leurs inclinations, qu’elles avaient la liberté de suivre. L’étoffe de leurs robes me parut la même ; la couleur du moins en était uniforme. Mais leur coiffure était variée, et je conçus qu’elle était ajustée à l’heur de leur visage. Un grand nombre de domestiques de l’un et de l’autre sexe, dont je remarquai néanmoins que ceux qui paraissaient du mien étaient des eunuques, se tenaient au coin du salon pour exécuter leurs moindres ordres. Mais cette foule d’esclaves se retira aussitôt que nous fûmes entrés, et les vingt-deux dames, se levant sans s’écarter de leurs places, parurent attendre les ordres de leur