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Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 1, 1857.djvu/79

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pour règle de conduite et inspiration de ses chants la noble devise qui résumait et commandait un triple dévouement. Troubadours et Trouvères vivent en même temps : ils ne s’entendent guère, ils ne se ressemblent pas.

À mesure que l’on avance, les faits se caractérisent avec plus de netteté. La prépondérance administrative et politique du Nord s’établit, se développe et se maintient, malgré des résistances dont les traces sont nombreuses et profondes. La langue profite de toutes ces conquêtes dont elle a été l’instrument le plus sûr, et le plus fréquemment employé.

Enfin, les chefs-d’œuvre arrivent. Les grandes et terribles luttes du xvie siècle avaient été précédées et accompagnées de discussions en langue vulgaire. Le xviie siècle aspire de bonne heure à cette domination que lui assurent les plus belles créations du génie, interprétées par un langage qui a perdu, sans doute, de sa naïveté primitive, mais qui est parvenu sans effort apparent, à une incomparable richesse. L’époque suivante, avec un but différent, aide encore à l’emploi général d’une langue qui avait détrôné le latin, et qui tendait à déposséder province par province, ville par ville, l’idiome méridional qu’elle attaquait à la fois dans la diversité de ses dialectes. La révolution, qui a voulu l’unité en tout, qui l’a voulue complète, absolue, sans tenir compte des exigences de toute nature, qui donnaient une raison d’être à des différences de forme et de détail, a fait pénétrer partout l’emploi de la langue française. Les campagnes, dernier asile de toutes les traditions du passé, ont reçu ainsi un élément de corruption pour l’idiome qui faisait encore, après tant de transformations, leur physionomie particulière. Elles n’ont pu parvenir à parler correctement le français ; elles n’ont pas su conserver à leur langage sa pureté, sa diversité, et cette grâce native, la première et la plus vive des beautés.

Ces conditions semblent bien défavorables ; et l’on se demande si, la nature même des faits, les tendances d’une centralisation à