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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/131

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moyen de rendre les hommes vertueux, de faire cesser le vice et le crime, était de répandre partout le comfort, de créer une richesse triple ou quadruple : à qui spécule sur le papier les millions ne coûtent rien. Enfin, par cette éthique nouvelle, on s’est étudié à enflammer la concupiscence, au rebours de ce que disaient les anciens moralistes, qu’il fallait d’abord rendre les hommes tempérants, chastes, modestes, leur apprendre à vivre de peu et à se contenter de leur sort, et qu’ensuite tout se passerait bien dans la société et dans l’État. On peut dire que sous ce rapport la conscience publique a été, pour ainsi dire, renversée sens dessus dessous : chacun peut voir aujourd’hui quel a été le résultat de cette singulière révolution.

Cependant il est manifeste, pour quiconque a réfléchi quelques instants sur les lois de l’ordre économique, que la RICHESSE, de même que la valeur, indique moins une réalité qu’un rapport : rapport de la production à la consommation, de l’offre à la demande, du travail au capital, du produit au salaire, du besoin à l’action, etc. ; rapport qui a pour expression générique, typique, la journée moyenne du travailleur, considérée sous sa double face, dépense et produit. La journée de travail : voilà en deux mois le bilan de la fortune publique, modifié de temps en temps, mais dans des limites beaucoup plus restreintes que le vulgaire ne le suppose, à l’actif par les trouvailles de l’industrie, du commerce, de l’extraction, de l’agriculture, de la colonisation et de la conquête ; au passif par les épidémies, les mauvaises récoltes, les révolutions et les guerres.

De cette notion de la journée de travail, il suit que la production collective, expression du travail collectif, ne peut en aucun cas dépasser d’une quantité appréciable le nécessaire collectif, ce que nous avons appelé le pain quotidien.