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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/165

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Voici donc qui est établi :

La guerre, fomentée par le paupérisme, entreprise en vue du pillage, organisée d’abord et indifféremment, tantôt par les particuliers, tantôt par les villes, est ensuite réservée à l’État. Le droit de guerre devient la prérogative du souverain. La piraterie, dernière expression des guerres privées, est notée d’infamie, vouée au dernier supplice. Mais la guerre ne perd pas pour cela son caractère de rapine ; les armes civiques ne sont pas plus pures que les armes héroïques ; loin de là, la spoliation, droit de la victoire, exercée sur une plus vaste échelle, s’étale dans toute son ignominie.

Et cela dure jusqu’à ce que, par un concours de circonstances que nous ferons ressortir plus loin, le pillage des populations, la dévastation des territoires soulevant la réprobation générale, la conquête se transforme en une simple incorporation politique, et force le conquérant à chercher dans l’exploitation de ses sujets les bénéfices de sa profession. L’histoire des Grecs, depuis la fin de la tyrannie dorienne jusqu’à Alexandre, nous offre sous ce point de vue la première et la plus intéressante de ces transitions. Il faut voir, par tous ses côtés, ce que fut cette civilisation grecque, si merveilleuse à tant d’égards, et dont les historiens marquent l’éclipse au moment juste où, selon les lois ordinaires de la société, elle aurait dû prendre un nouvel essor, si la race grecque, avec tout son génie, avait été capable de concevoir l’idée d’une civilisation véritable.