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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/167

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qu’il part de plus bas, et qu’il s’est incarné, depuis la dernière révolution, non plus dans une poignée de nobles châtelains, mais dans la bourgeoisie des villes, dans la plèbe des républiques.

En premier lieu, tout ce qui, étant grec d’origine, n’avait pas fait partie de la confédération contre les Perses, fut déclaré tributaire : tel fut le sort des lies de Carystos, de Naxos, de Thasos, subjuguées par les Athéniens. Peut-être y avait-il lieu d’exprimer un blâme contre le patriotisme équivoque de ces insulaires qu’avaient effrayés les immenses flottes et les innombrables armées du grand roi. Mais les frapper de déchéance, les rendre tributaires au lieu d’en faire l’objet d’une incorporation qui sauvegardait tous les intérêts, c’était dépasser le droit des gens et faire une application abusive du droit de la force. Ceci nous rappelle le roi de Saxe, condamné par le Congrès de Vienne à perdre la moitié de ses états, pour ne s’être pas prononcé à temps contre Napoléon.

Ce fut bien pis dans le Péloponèse : les Messéniens et les Hilotes furent mis sous le joug par les Spartiates. On ne comprend pas les éloges donnés jusqu’au dix-neuvième siècle à cette communauté de nobles gueux, organisés uniquement pour le brigandage, et vivant dans une pénurie dont ils avaient fait, par haine de toute occupation utile, un article de leur droit public. La guerre pour le pillage, et le pillage pour moyen d’existence, voilà en deux mots toute l’institution de Lycurgue, voilà la vertu spartiate. C’est le modèle qui servit à Platon pour son utopie de république.

La querelle entre Sparte et Athènes eut pour principe le partage des villes tributaires. A nous autres civilisés du dix-neuvième siècle, pareil litige semble exorbitant, monstrueux. Des villes, des populations entières, de sang grec, de religion et de langue hellénique, transformées en de