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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/182

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versoirs. Les établissements formés dans les deux Amériques, en Afrique, en Asie, en Australie, en Océanie, ont pesé d’un poids considérable dans la paix du monde. Mais cette situation ne saurait durer longtemps. Tous les coins du globe auront bientôt été fouillés ; partout le sol est approprié ; les contrées naguère les plus désertes s’emplissent de colons européens qui deviennent aussitôt ennemis de leurs mères-patries, tout prêts à s’armer contre elles. Que reste-t-il à conquérir sur le globe ?… Le jour où l’Inde, l’Australie, les îles de l’Océanie, l’Afrique, toutes les contrées actuellement exploitées par les Européens auront proclamé ou recouvré leur indépendance; où, disposant souverainement de leur propre richesse, élevant le prix de leurs denrées et faisant concurrence à nos propres articles, elles ne nous livreront plus rien que contre un juste équivalent, ce jour-là toutes les nations du globe se trouveront bloquées les unes par les autres et refoulées dans leur paupérisme respectif. Alors si l’équilibre ne s’établit partout entre la production et la consommation, si les facultés génératrices continuent a déborder les facultés industrielles, les motifs politiques ne manquant pas, la lutte éclatera inexorable, universelle.

En ce moment toutes les prévisions sont à la guerre. Et certes, à ne considérer que le côté politique des choses, jamais pareille complication ne s’était présentée à l’homme d’État. Toutes les questions surgissent à la fois, scabreuses, irritantes, conçues dans les termes les plus capables de désespérer le diplomate et de précipiter les masses sur les champs de bataille:questions de réforme politique et questions de nationalité ; question d’équilibre européen et question de frontières naturelles ; question de centralisation et question de fédération ; question d’intervention ou de non-intervention et question de protectorat ; question du temporel et question du spirituel ; question du servage