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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/199

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jours à l’emprunt, et qui ne peut retenir chez lui le numéraire. Question de subsistance : cas de guerre.

L’Autriche est à peu près dans le même cas. Elle n’a pas assez de son port de Trieste : elle y joindrait volontiers les bouches du Danube et Salonique. Comment s’entendre, pour cet objet, avec la Russie, demandant Constantinople ? Dépossédée de la Lombardie qui lui rapportait, bon an mal an, d’après les calculs d’un économiste italien, trente millions net, elle veut la ravoir, et, si l’occasion se présente, elle la raura. Les paysans de Lombardie lui serviraient au besoin d’auxiliaires ; elle n’aurait qu’à leur offrir, comme à ceux de Gallicie, une part des terres. Ce qu’il y a de curieux, c’est que l’Autriche, en faisant ce coup, pourrait se flatter de servir la révolution mieux que nous ne l’avons servie nous-mêmes, en rendant la Lombardie à Victor-Emmanuel. Question de subsistance : cas de guerre.

Pourquoi, depuis quelques années, les nations de l’Europe se montrent-elles animées contre la France de sentiments hostiles ? En Espagne, à propos d’un bruit absurde que Napoléon III voulait avoir la Catalogne, on réchauffe les souvenirs de 1808 ; de même qu’en Allemagne, en Suisse, en Belgique, à propos de l’annexion de la Savoie, on réveille ceux de 1813. Que dis-je ? pour nous mieux accabler, l’Europe semble vouloir se faire plus libérale, plus révolutionnaire que nous. L’Espagne est moitié progressiste, moitié républicaine ; l’Italie se moque de nos conseils, tout en implorant notre intervention, et se couvre de son unité[1] ; l’Allemagne serre ses rangs fédéraux, et

  1. Il est à remarquer que dans les discussions auxquelles le décret du 21 novembre a donné cours, tant au sein du Corps législatif et du Sénat que dans la presse, le patriotisme des conservateurs s’est montré beaucoup plus susceptible, à l’endroit de l’unité italienne, que celui des démocrates. En 1815, on disait plus royaliste que le roi. On dit aujourd’hui,