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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/202

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les Maronites, tous les chrétiens de Turquie demandent au sultan la jouissance des droits politiques, façon parlementaire de dire qu’ils ne veulent plus payer. Victorieux ou vaincu, le chef d’État est assuré d’entendre toujours la famine frapper à sa porte.

Qu’a voulu la bourgeoisie italienne ? Songea-t-elle jamais à l’unité de l’Italie ? Comprend-elle seulement la mécanique constitutionnelle ? A-t-elle une religion, une foi quelconque ? Elle était assez maigre, ayant peu de biens fonciers, pas d’influence, nulle part dans le gouvernement. Elle a voulu, comme celle de 1830, comme celle de 1789, être, ou plutôt avoir quelque chose, entrer dans les affaires, prendre sa part du budget, s’apanager à bon compte à la vente des biens nationaux, s’engraisser en un mot : une bourgeoisie saurait-elle vouloir autre chose ? Elle en avait le droit, certes ; est-ce que je songe à lui en faire reproche ? Qu’est-ce que le Tiers ? Rien. Que demande-t-il ? Tout. Pesez cette parole de Sieyès : c’est la formule de toute bourgeoisie qui se prépare à supplanter les castes supérieures, clergé, cour et noblesse. Mais, pour jouir avec sécurité des conquêtes de sa révolution, la bourgeoisie italienne comprend qu’une monarchie constitutionnelle lui offre plus de garanties qu’une république. C’est la pensée bourgeoise de 89 et de 1830, c’est celle de la réaction de 1848 et de 1852. Voyez avec quel ensemble ces bourgeois se rallient autour de M. de Cavour contre les Mazziniens et Garibaldiens !… Ils pensent aussi, les avisés, que la reconnaissance en politique est une vertu onéreuse, et comme ils s’étaient unis autour de l’empereur des Français pour chasser l’empereur germanique, ils se réunissent autour de Victor-Emmanuel pour s’acquitter envers l’empereur des Français. Il n’y a pas trop pour eux. Quant à la multitude, force brute, chair et sang, qui ne sait que bêler ses suffrages, rien pour elle ; je me trompe, la conscription.