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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/206

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gré la conquête, et en raison même de la conquête, dans une gêne croissante, telle est leur condition. L’Angleterre, de toutes les puissances celle qui a le plus conquis, qui exploite cent vingt millions d’Indiens, qui possède un continent tout entier, qui a sous la main la moitié de l’Afrique ; l’Angleterre est aussi la plus avide de nouvelles possessions, la plus chatouilleuse à l’endroit des annexions du voisin. Les petits États, tels que la Suisse, la Belgique, le duché de Bade, trop faibles pour s’arrondir aux dépens de leur entourage, en sont quittes pour lancer par bandes leurs émigrants sur tous les points du globe ; autrefois, l’Irlande, l’Écosse, la Suisse, avaient de plus la faculté de louer leurs milices à l’étranger. L’expatriation, le mercenarisme, sont les déversoirs des souverainetés de second et de troisième ordre, à qui l’exercice du droit de guerre se trouve de fait interdit.

Gloire aux potentats, à qui seuls le monde doit le peu de repos dont il jouit : leur grandeur fait notre sécurité. Et le sceptre ne leur sera ôté que le jour où le monde aura trouvé sa constitution économique, qui n’est autre que la constitution de la paix elle-même, but final des révolutions. C’est d’eux qu’il a été écrit, dans le testament de Jacob : « Non auferetur sceptrum…, donec veniat pax, et ipsa est expectatio gentium. »