Aller au contenu

Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/267

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

libre autant que la mer elle-même ; qu’il était contradictoire de combattre pour la liberté du véhicule et d’intercepter la marchandise ; que si la France était en mesure de suppléer, par ses propres produits, aux importations qu’ils tiraient d’Angleterre, ils donneraient volontiers la préférence aux Français, mais que dans le cas contraire le soin de leur subsistance leur défendait de repousser les marchandises britanniques ; que si le système continental, imaginé par l’empereur, ne pouvait se concilier avec cette donnée de simple bon sens, il fallait songer à réformer ce système ; que c’était à Napoléon de voir comment il pourrait réduire les Anglais sans attenter à l’existence des neutres ; que l’Espagne n’étant pour rien dans la guerre, il serait injuste de lui en faire supporter les charges ; que pour le surplus, ils pensaient que c’est un méchant moyen de régénérer une nation que de lui ôter son indépendance, et, en changeant sa dynastie, de lui arracher, pour ainsi dire, l’insigne de sa souveraineté ; qu’ils souhaitaient donc très-véhémentement de rester maîtres chez eux ; que leur bien-être en souffrirait moins ; finalement, que si lui, Napoléon, empereur des Français, attentait à leur nationalité en occupant militairement leur pays, eux de leur côté aviseraient à se défendre, et qu’ils le rendaient d’ores et déjà responsable des événements ; quant à ses prédictions, qu’ils tenaient pour maxime que des gens de cœur doivent avant tout faire leur devoir, et s’en remettre pour les suites à la garde de Dieu. »

On sait ce qui arriva. Napoléon, en guerre déclarée ou latente avec l’Europe, eut bientôt lieu de se convaincre que les affaires ne pouvaient se mener ni si rapidement ni toutes à la fois, et que l’art et la vitesse ne sauraient à la guerre tenir lieu de la force. Il ne put vaincre l’Espagne chez elle. D’abord, les Français furent généralement vainqueurs en bataille rangée ; toutes les villes