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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/311

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g) Enfin, on invoque de nouveau la loi d’antagonisme. L’idée de paix, dit-on, est négative. Or, la société a été formée par la guerre : comment tomberait elle sous la loi du néant ? — Mais il ressort de tout ce que nous avons dit que la paix n’est pas la fin de l’antagonisme, ce qui voudrait dire en effet la fin du monde ; la paix est la fin du massacre, la fin de la consommation improductive des hommes et des richesses. Autant et plus que la guerre, la paix, dont l’essence a été jusqu’ici mal comprise, doit devenir positive, réelle, formelle. La paix donnant à la loi d’antagonisme sa vraie formule et sa haute portée, nous fait pressentir par avance ce que sera sa puissance organique. La paix, enfin, dont l’inexactitude du langage a fait jusqu’ici le contraire de la guerre, est à la guerre ce que la philosophie est au mythe : on garde celui-ci pour l’amusement de l’enfance, pour l’embellissement de la littérature ; à la raison seule il appartient de diriger la conscience et l’action de l’homme.

En résumé, l’hypothèse d’une paix universelle et définitive est légitime. Elle est donnée par la loi d’antagonisme, par l’ensemble de la phénoménalité guerrière, par la contradiction signalée entre la notion juridique de la guerre et sa cause économique, par la prépondérance de plus en plus acquise au travail dans la direction des sociétés, enfin par le progrès du Droit, droit de la force, droit international, droit politique, droit civil, droit économique. La guerre a été le symbole, la paix est la réalisation. La constitution du droit dans l’humanité est l’abolition même de la guerre ; c’est l’organisation de la paix. Tous les peuples ont accueilli cette promesse ; tous ont rêvé de changer leurs lances en charrues et leurs socs en faucilles. Jusqu’à présent le monde a eu des paix temporaires : il y a eu, seulement depuis deux siècles, la paix de Westphalie, la paix de Nimègue, la paix d’Utrecht, la paix d’Aix-la--