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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/318

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la religion, puisque la religion, variable dans ses formes, se réfère toujours à la justice, tandis que la justice subsiste par elle-même, s’impose à toutes les sectes et demeure immuable ; — ce n’est pas, enfin, la liberté, toujours invoquée avec ferveur aux époques de décadence et de despotisme, mais qui ne peut exister sans la justice, qui reçoit sa règle de la justice, tandis que la justice est à elle même sa propre loi et peut se passer même de liberté.

La justice est pour l’humanité force motrice et cause finale : cela résulte de ce qu’elle est, comme nous l’avons expliqué, non simplement une idée mais une puissance ; que toute puissance tend à l’expansion d’elle-même aux dépens de ce qui l’environne ; et que la justice étant la première de nos puissances, elle entraîne et subordonne toutes les autres. Et si nous cherchons la preuve de cette vérité dans les faits, la guerre nous la fournira. Nous avons vu l’évolution guerrière aboutir, par la consécration du droit de la force, à la domination romaine, c’est-à-dire à la proclamation du droit universel ; nous avons vu ensuite le moyen âge essayer, par l’alliance de la papauté et de l’empire, une première constitution, moitié réaliste, moitié mystique, de ce droit ; nous savons aujourd’hui que le droit ne sera définitivement constitué, universalisé et réalisé que par l’élimination de l’élément religieux, et la reconnaissance du droit économique, c’est-à-dire par la révolution. Immanence et réalité de la justice dans l’humanité, tel est le grand enseignement que nous donne la guerre.


La justice, toujours d'après le même témoignage, base et pivot de toute croyance. — Si la justice est le mobile et la fin de la civilisation, si elle est supérieure à toute force, à tout dogme, à tout idéal, il s’ensuit encore que la justice est la base de toute croyance, de même que