Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/297

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vertement la Révolution à Paris, allait la supprimer à Rome ; qui déclarait la guerre aux idées ; qui disait tout haut : Pas de concessions ! qui répétait à chaque instant, comme au 23 juin, le dicton fatal : Il faut en finir ! la situation était nette, il n’y avait pas à s’y méprendre. La persécution était ouverte contre la démocratie sociale ; nous étions dénoncés au mépris et à la haine, dévoués, le ministre auteur du projet de loi ne s’en cachait pas, à la vindicte de l’autorité. Qu’on en juge par ce trait que la Presse rapportait naguère, et que je voudrais buriner sur une table de bronze, pour l’éternelle honte de celui qui en fut le héros :

« Il y a quelque chose de plus difficile à qualifier que le traitement infligé à M. Furet, c’est la lettre écrite par M. Léon Faucher, alors qu’il était ministre de l’intérieur, à son collègue le ministre de la marine, relativement au régime que devaient subir au bagne les insurgés de juin. On ne s’est pas borné à recommander qu’aucune différence n’eût lieu entre eux et les forçats condamnés pour meurtres et pour vols ; on a poussé le raffinement de la répression jusqu’à refuser aux condamnés de juin la consolation de les accoupler entre eux, et jusqu’à prescrire de river chaque insurgé à un meurtrier ou à un voleur ! Heureusement, l’intérim du ministère de l’intérieur ayant été confié à M. Lacrosse, d’autres ordres très différents ont été donnés. »

M. Léon Faucher est un de ces types qui ne se rencontrent qu’une fois en quarante siècles. Pour trouver son pair, il faut remonter aux temps fabuleux, à ce brigand homérique, qui faisait périr ses victimes en les attachant à des cadavres. Eh bien ! c’est cet homme qui, le 29 janvier, par amour de l’ordre ! traduisez, par haine de la révolution, conviait la garde nationale au massacre des socialistes ; qui, le 21 mars, présentait la loi brutale qui faillit amener le renversement du pouvoir ; qui, le 11 mai, pour écarter de la repré-