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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/170

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quoi l’amour le laissait insatisfait, pourquoi tout le laissait insatisfait, sinon espérer autre chose, sinon la fièvre de l’avenir. Lui aussi, ce soir-là, pensait à sa maîtresse. La belle Valérie ne réalisait-elle pas, en somme, un maximum de commodité ? Nangès, au dedans de lui, en convenait, mais les plaintes de cette jeune femme l’exténuaient.

Une rose rouge dans la main, elle lui avait dit le soir même, pour une futilité :

— Cher, on dirait que vous prenez plaisir à me faire du mal. Oh ! que vous m’énervez ! que je vous en veux !

Il connaissait ces artifices. La voix s’alanguissait. Le pied s’agitait nerveusement. Cette poupée trop jolie exaspérait le capitaine. Il avait des envies furieuses de l’insulter et de jeter à sa blondeur des mots de caserne. Timothée s’ennuyait à l’extrême, d’avoir à se trouver devant elle tout à l’heure.

Derrière lui, des lieutenants se promenaient sur la plate-forme, évitant, dans la nuit familière, les prises d’air grillagées de l’usine électrique et les rails encombrés de wagonnets. Ils parlaient de leurs plaisirs, du casino, d’un tapage nocturne récent. Nangès envia leur