Aller au contenu

Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/174

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’âme analogue à celui qu’éprouvait alors le jeune homme.

Là, tous les arbres, toutes les herbes lui étaient connues. Du fond de la paisible vallée, c’était toute son enfance qui remontait vers lui comme une chanson inexprimable. Jamais il n’avait revu la terre aimée avec autant d’émotion. Aujourd’hui, pour la première fois, il se sentait un homme, et c’était d’une autre vie que lui parlait la chanson délicate du vent dans les hautes cimes des arbres. Encore si jeune, il éprouvait, pour la première fois, le sentiment du passé, et d’une connaissance immédiate, totale, inanalysable. Il ne vivait plus dans son enfance. Il en était sorti, et il la regardait doucement, comme une étrangère venue de loin et dont, dès l’abord, on se sent l’ami.

Quand Maurice Vincent entra dans la maison d’école, toute nue et blanche, il comprit confusément que c’était un homme nouveau, un homme tout simplement qui pénétrait dans l’asile de sa jeunesse. Déjà il s’effarait de ce que, tout étant resté si pareil, lui-même eût tant changé. Mais avait-il donc tant changé ? À côté des enseignements de son père, n’avait-