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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/173

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tant à sa manche de beaux galons neufs, gravissait lentement, à cause de la douceur charmante de l’air, la grande allée de peupliers d’Italie qui mène de Crécy au bourg de Voulangis. Ses larges basanes lui donnaient une lourde démarche de scaphandrier. Sur l’épaule, il portait, au bout d’un bâton noueux, un petit paquet qu’enveloppait un large mouchoir multicolore.

Parfois le jeune homme s’arrêtait. Il écoutait monter les bruits de la petite vallée du Morin. Elle sinuait au bas de la côte boisée qui tombait en pente raide sur le côté droit de la route.

C’était un paysage uni, intime et secret que contemplait Maurice Vincent. Un bicycliste, un automobiliste, ou simplement un homme pressé ne s’y attarderait pas. Mais, pour dire ce que ces arbres, ces frémissements lointains, ces mousses, ces gaulis, murmuraient à Maurice Vincent, les notations imparfaites dont nous disposons sont insuffisantes. Au vrai, le retour à tant de douceur, à tant de noble candeur, lui noyait l’âme de tendresse. Il faudrait de la musique pour exprimer une aussi mystérieuse influence. Si l’on veut, le début du deuxième acte de Siegfried peut mettre dans un état