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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/204

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— Au moins, soignez-vous bien là-bas, mauvais garçon, et écrivez-moi un peu de temps en temps.

Oh ! ces riens, ces enfantillages, ces phrases naïves, comme elles s’inscrivent dans la mémoire du jeune homme, et comme il connaît déjà qu’elles forment le fond subtil et aérien devant lequel il se mouvra désormais ! Serré contre sa fiancée, Maurice voudrait se pénétrer à jamais de son odeur agreste, qui paraît plus aiguë dans la pénombre de cette gare. Cette fois-ci, aucune pensée d’avenir ne l’importune. Il s’abandonne au rêve charmant que l’heure talonne…

Deux phares parurent dans la nuit. Ils étaient l’image de la fatalité…

Rien ne rend le désir aussi âpre que la griserie d’un départ, l’inconnu qui vous enfle le cœur, la fièvre d’une heure inscrite. Tous deux goûtent le moment unique où toutes les forces de l’amour sont concentrées, ardentes, et impuissantes tout ensemble, à dompter le destin. Ils s’enchantent de la plénitude de l’amour, et de ce que leurs nerfs sont exaspérés par tant de beauté, tant de douceur. Maurice oubliait tout. Comme la jeune fille penchait en arrière