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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/313

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V

Un jour, — un an après, — Nangès se laissa entraîner un peu loin dans la poursuite d’une bande qui depuis longtemps échappait à l’étreinte. Il avait une troupe bien montée et rompue à toutes les fatigues. Toute la journée, il avait marché vers le nord, suivi de Maurice et de ses méharistes maures, droits sur leurs selles et silencieux dans le grand silence des sables. C’était l’hiver. Le vent d’est soulevait sur la mer des dunes une impondérable écume tremblante. Vers le soir, il y eut un grand apaisement. Le vent tomba. Le ciel prit une profondeur infinie. Sa teinte immatérielle reposait les nerfs, mais aussi elle laissait au cœur une sorte de lassitude inquiète d’infini qui amollissait.

Sur un signe du chef, les chameaux s’agenouillèrent. Les hommes mirent pied à terre, la carabine au point. C’était l’heure de la prière. Pendant quelques minutes, on n’entendit que le chuchotement des voix tremblantes.