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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/318

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immense, une joie trop vive pour des nerfs fatigués. Il supplia Timoléon de continuer.

— D’abord, fit l’ombre pensive, vous avez ceci.

Il montra les couloirs de schiste où circulaient d’épuisantes mélodies aériennes.

Nangès eut la perception brusque du déroulement rose du Sahara. Il s’y sentait perdu dans un point imperceptible de l’espace, bercé dans un élément nouveau qui n’était point la terre tout à fait, ni la mer, ni le ciel, mais qui participait à ces trois infinis.

— Lorsque je tenais garnison à Vincennes, continua Timoléon d’Arc, que n’aurais-je pas donné pour subir ce charme atroce et voluptueux !

Je saisis votre pensée, Monsieur, répondit Nangès. Mais vous me semblez ignorer en quelle piètre estime les hommes de mon temps ont ces sables et ces cailloux. Le bourgeois a la crainte de ce qu’il ne comprend pas. Il tremble aux mots d’infini, d’absolu. Le Sahara lui fait peur, comme la musique de Wagner. Nous sommes ici par surprise, en conquérants honteux. J’ai perdu, il y a quelque temps, un de mes officiers qui s’est très