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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/93

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« margis ». Là résidait toute l’activité militaire que présentait ce pauvre terrain dépouillé. Quelques canonniers noirs de la Martinique se promenaient indolemment. Des vieux, à moustaches tombantes, aux poils rudes, ou de grands diables roux à faces carrées, que l’on reconnaissait vite pour d’anciens légionnaires, passaient lentement, leur musette de pansage à la main, et disparaissaient dans la cour des écuries.

Et pourtant, ce qui réconfortait Nangès, c’étaient ces vieux soldats, durs visages bronzés, briqués, crevassés. Ces briscards lui semblaient seuls désormais maintenir la tradition du vieux soldat français, des soldats de l’Empire. À cause de leurs vertus guerrières, autant que pour leurs défauts mêmes, Nangès les affectionnait. C’était la tradition qu’ils représentaient, la tradition du soldat de métier, qu’il aimait en eux. En somme, c’étaient là les mêmes hommes que les soldats de l’Italie et du Mexique, mêmes conditions de vie, mêmes origines, même esprit. Ceux-là n’étaient pas des « électeurs conscients », ils n’avaient pas l’esprit très souple. Peut-être restaient-ils trop loin de la cité. Mais qui sait si, au