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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/92

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ainsi qu’il affectionnait le jeune lieutenant de C. qui n’avait aucun de ses goûts ni aucune de ses idées, mais qui, derrière ses yeux ternes de philosophe triste, savait contenir une fièvre qu’il ne voulait pas montrer.

Tous les matins, à dix heures, quoiqu’il eût fait dans la matinée, le capitaine Nangès était au bureau de sa batterie. Souvent, l’après-midi, il retournait au quartier et on l’y voyait au manège, tenant un cheval à la longe, la tunique déboutonnée, la chambrière à la main, ou bien encore dans la cour des écuries et surveillant le pansage des chevaux de sa batterie.

Mais il ne pouvait se faire à la tristesse des grandes cours désertes. Il avait beau y passer et y repasser : ces deux grandes bâtisses parallèles et, au fond, derrière le mur, les antennes métalliques de quelque vaisseau de guerre au repos, le silence de cette partie écartée de l’arsenal, c’était la mortelle mélancolie des bâtiments désaffectés. Quelquefois, dans cette cour, le matin, il voyait cinq ou six jeunes soldats réunis autour d’une pièce de 75 : c’étaient des engagés volontaires qui faisaient leurs classes sous le regard sévère d’un vieux