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Page:Régnier - Les Médailles d’argile, 1903.djvu/163

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l’arbre de la route

LES ENNEMIS


J’ai vu l’Amour, un soir, combattre un autre Amour.
L’un riant de courber son frère terrassé.
Et l’autre, au souple bras qui le tient enlacé,
Mordant la chair parente où frappe son poing lourd.

Combat silencieux de la Nuit et du Jour
Qui heurte le dieu nu contre un dieu cuirassé.
Et le muscle meurtri pressant l’airain faussé
Et chacun d’eux vainqueur et vaincu tour à tour.

La lutte consanguine, amoureuse et farouche,
De sa quadruple étreinte et de sa double bouche,
Lie en un corps jumeau l’âpre couple guerrier,

Jusqu’à l’heure où le vent de l’aube matinale
Sèche aux membres rompus du groupe meurtrier
La sueur fraternelle et la pourpre rivale.