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Page:Répertoire national ou Recueil de littérature canadienne, compilé par J Huston, vol 1, 1848.djvu/13

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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.

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ta nombreuse famille, sous l’ombrage d’un antique sycomore, et tu lui répéteras ce que je vais te raconter ; elle le redira dans la suite à ses enfans, qui le transmettront d’âge en âge jusqu’à la fin des siècles ; afin que les hommes apprennent à respecter les décrets du Souverain Dispensateur des évènemens, et à ne jamais murmurer contre la Providence.

Dans les jardins délicieux d’un puissant de la terre, vivait un mortel chéri des Dieux, dont l’unique soin, dès son enfance, était d’arroser plusieurs fois le jour les tendres fleurs séchées par les ardeurs du soleil. Dans l’obscurité de sa condition, il était heureux, parce qu’il n’avait point les désirs qui dévorent le cœur des avides humains. Le bonheur qui fuit les lambris dorés, vient plus souvent habiter sous le chaume, et se plaît dans sa simplicité. C’est lui qui répand la sérénité sur le front du laboureur, tandis que le riche, au sein de ses trésors, n’offre dans ses regards pâles et livides qu’un objet rempli d’horreur. L’aurore voyait l’heureux Zelim commencer avec plaisir son travail ordinaire, l’astre du jour au terme de sa carrière le laissait occupé à se préparer un repas frugal, jouissant d’un repos plein de charmes que les fatigues de la journée lui rendaient encore plus précieux. Son bonheur était parfait s’il eût été durable. Mais hélas ! comme la feuille que le moindre zéphyr agite, le cœur de l’homme éprouve de continuelles agitations. Tel est son triste sort, qu’il ne se croit jamais heureux : l’ambition vient le chercher jusque dans les retraites les plus écartées. Pourquoi, dit-il un jour, en jetant ses regards sur les vastes palais du Sultan, pourquoi le destin m’a-t-il si mal partagé que de me faire naître dans l’état misérable de jardinier ; aussi peu considéré sur la terre que l’atome dans l’immensité de la nature ; tandis que d’autres dans l’abondance, les grandeurs et les richesses filent sans inquiétudes les jours les plus fortunés. Oui ! le bonheur doit être plus grand sur le trône que dans une chaumière qui me défend à peine des injures des saisons. À peine cette funeste pensée se fût-elle emparée de son esprit que