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Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/23

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alla à Ferrare ; il revint à Bâle et à Strasbourg ; il retourna à Noyon pour mettre ordre à ses affaires, puis il repartit pour Bâle, qui fut comme son pied-à-terre pendant deux années de voyages continuels. Ce fut en revenant de Noyon à Bâle qu’il passa par hasard à Genève, faisant un grand détour, pource qu’à cause des guerres le droit chemin était fermé. — Il ne songeait pas à y séjourner ; il voulait même y passer incognito, mais une indiscrétion révéla sa présence. Aussitôt Farel va le voir et l’invite à rester à Genève, où la cause de la réformation réclamait le zèle et les lumières d’un serviteur de Dieu tel que lui. Calvin s’excuse : il aime les études solitaires, il veut augmenter ses connaissances, sa timidité le rend peu propre aux agitations de la lutte ; ne peutil pas d’ailleurs servir Dieu en éclairant le monde par ses écrits tout aussi bien qu’en se jetant à corps perdu dans la mêlée ?

Là-dessus, dit Calvin, Farel, tout brûlant d’un zèle incroyable d’avancer l’Evangile, déploya toutes ses forces pour me retenir, et ne pouvant rien gagner par ses prières, il en vint jusqu’à l’imprécation, afin que Dieu maudit ma vie retirée et mon loisir, si je me retirais en arrière, ne voulant lui aider en une telle nécessité. L’effroi que j’en reçus, comme si Dieu m’eût saisi alors du ciel par un coup violent de sa main, me fit discontinuer mon voyage, en telle sorte pourtant que sachant bien quelle était ma timidité et mon humeur réservée, je ne m’engageai point à faire une certaine charge.